Le mythe sur le viol et ce qui l’alimente

TW VIOLS / VIOLS CONJUGAUX

Aujourd’hui recadrage sur le viol.

Si on ne s’est pas un minimum renseigné-e sur le sujet ou si on n’en a pas été victime, quand quelqu’un-e parle de viol, on pense à quoi ?

La majorité des personnes penseront à un inconnu dans une ruelle sombre, la nuit, qui va attaquer une femme et la violer.

C’est ce qu’on appelle un mythe.

Parce que dans la réalité, ce n’est pas ça.

Alors oui ce genre de situations décrites précédemment peut arriver et arrive. Mais c’est loin d’être le schéma de viol le plus répandu et c’est loin d’être le seul cas de viol pourtant c’est celui-là qui nous est uniquement présenté depuis qu’on est petit-e.
Ce mythe n’est pas anodin, il permet de camoufler la majorité des violences sexuelles de notre société, à savoir que dans 90% des cas*, le violeur est une personne connue et proche de la victime.

Comment s’opère le camouflage de ces faits ?

C’est simple, on fait en sorte que ni les coupables ni les victimes ne se rendent compte que ce qu’ielles ont fait ou subi est un viol.

En effet :

  • si on associe au mot « viol » l’inconnu dans la rue sombre avec un couteau alors quand on force sa copine à avoir une relation sexuelle, ben forcément  ce n’est pas un viol.
  • si on associe au mot « viol » l’inconnu dans la rue sombre avec un couteau alors on ne se pensera pas victime de viol quand notre mec nous pénétrera dans notre sommeil, quand on cédera après des heures de culpabilisation de sa part ou quand il passera outre nos « non » répétés inlassablement tout en essayant de le repousser.

Malheureusement, il s’agit bien de viols. De viols ordinaires** parce qu’ils ont lieu tous les jours et qu’on ne le sait même pas. C’est devenu banal, normal.

Après tout, je l’aime, c’est mon mec, j’ai envie de coucher avec lui la plupart du temps alors c’est normal ce qu’il se passe non ? Les couples font ça, « l’amour », non ? C’est forcément moi qui ai un problème et je ne vais quand même pas ruiner notre relation juste parce que je n’ai pas envie de baiser là tout de suite ? Il paraît que l’appétit vient en mangeant hein ! Et puis si je ne le fais pas il va forcément aller voir ailleurs parce qu’un homme ça a des besoins et moi je suis aussi là pour les combler. Un couple c’est fait de compromis, on ne peut pas penser qu’à nous. Et je préfère me forcer plutôt que de le laisser me tromper. Allez, regarde le plafond, laisse-le faire son affaire et puis c’est fini. J’en ai marre de batailler pendant des heures, de le supplier, de lui dire « non », de le repousser. Si je le laisse faire, si je cède, ça passera plus vite. Il me lâchera. Voilà ce qu’il se passe dans nos têtes quand on est confronté-e-s à ça. On essaye de raisonner, de se convaincre. On essaye de trouver des excuses, des raisons. Tout est plausible plutôt que de se dire qu’il s’agit de viols. Les personnes qu’on aime et qui nous aiment ne peuvent pas nous faire autant mal. Cette phase de déni peut durer éternellement. On ne comprendra donc pas pourquoi nous nous sentons aussi mal à chaque fois. Puisque tout est censé être normal, aller bien, aller de soi.

Une fois ça m’est arrivé. Je n’avais pas envie. Je lui ai dit « non », une première fois, calmement, parce qu’au début on se dit qu’il va s’arrêter directement. Il ne s’est pas arrêté. Je dis « non » à nouveau. Rien ne change. Il continue à me déshabiller comme si de rien n’était. Il a commencé son affaire et puis, enfin, s’est arrêté après avoir vu mes larmes. Il se dit ENFIN qu’il y a un truc qui cloche.
Ce garçon c’était mon mec à l’époque. Un mec bien. Mais ça n’a rien empêché. Les mecs bien peuvent être des violeurs. Les violeurs ne sont pas des monstres***, des malades mentaux. Ce sont, la plupart du temps, des mecs ordinaires qui ont grandi dans cette société sexiste, patriarcale et empreinte de culture du viol**** et qui en ont intégré les codes.

Mettons-nous bien d’accord, il n’est pas acceptable d’EXCUSER les violeurs en se cachant derrière l’argument : « C’est la société, c’est pas eux, c’est pas de leur faute. », juste NON. C’est important d’expliquer ce qu’il y a derrière, pourquoi le viol conjugal est autant banalisé, pourquoi les victimes et les coupables n’en ont pas forcément conscience sur le moment. C’est important également d’être bien au clair avec ça pour savoir où frapper, pour trouver comment faire disparaître la culture du viol et comme beaucoup de choses ça passe nécessairement par l’éducation. L’éducation au respect, à l’égalité, au consentement et à la communication.
Mais rappelons bien que dans tous les cas, c’est le violeur qui est coupable. C’est lui qui est responsable. N’essayez même pas de vous dédouaner avec les messages véhiculés par la société, la culture du viol ou je ne sais quoi encore. Oui ça a un poids, oui ça joue, non ça ne vous déresponsabilise pas de ce que vous avez fait.

Il y a des hommes (si, si) qui vivent dans la même société que vous et qui ne violent pas, incroyable hein ?

Avant de terminer cet article et de vous mettre le panel de liens habituels qui viendra compléter mon propos, j’aimerais revenir sur une chose importante.

Nous l’avons vu, 90% des viols ont lieu dans un cercle proche avec des personnes connues de la victime. De plus nous savons (sauf 27% des Français-es apparemment) que RIEN ne justifie un viol, RIEN n’appelle au viol. En clair la victime qu’elle soit en doudoune, mini-jupe, jean, jogging, robe, ou même qu’elle soit à poil, n’est JAMAIS responsable de son viol. Le seul responsable c’est le violeur, c’est bon, c’est imprimé ?

Nous savons que peu importe notre tenue, peu importe notre comportement, peu importe l’endroit où nous nous trouvons, nous risquons d’être violé-e-s. Et à plus forte raison par un proche chez nous.

raisons-agression

ALORS POURQUOI NOUS DEMANDER DE FAIRE ATTENTION EN PERMANENCE ? POURQUOI NOUS EFFRAYER CONSTAMMENT DÈS NOTRE PLUS JEUNE AGE ? JUSTE POURQUOI ?

(oui je suis vénère, c’est dans le nom)

Non mais en vrai ça sert à quoi ces messages pour nous demander d’être prudentes ?
Je devrais être prudente par rapport à quoi ?

– A ma tenue ?

Vous avez lu ou pas ? J’ai plus de chances d’être violée en pyjama chez moi qu’en robe décolletée dehors, est-ce que je peux au moins avoir ce pétard de plaisir de porter ce que je veux ?

– A l’heure à laquelle je sors ?

Idem. Ça n’a juste aucun impact. Il y a autant de risques d’être violé-e-s la nuit que le jour.

– A l’endroit où je me trouve ?

Même réponse. Au final c’est l’endroit où on se sent le plus en sécurité, là où on est censé-e-s être le moins vulnérables, qui représente le plus grand danger.

Donc on fait quoi ? On va vivre dans une grotte ? On reste seul-e-s toute notre vie ? On ne cotoie aucun homme ?

– A ma consommation d’alcool ?

Ah pardon donc en fait c’est à moi de faire en sorte de ne pas être violée en m’empêchant de vivre, c’est ça le projet ? Donc à partir du moment où je bois, j’accepte ce risque d’être violée et je deviens complice ? Coupable même ? Est-ce que vous pouvez arrêter de vous foutre de notre gueule deux minutes ? C’est possible ? C’est bientôt le 8 mars, préparez-vous.

Est-ce que ça vous est venu à l’idée juste un instant qu’il faudrait peut-être arrêter de demander aux victimes de faire ci et ça pour se protéger, compte tenu du fait que peu importe ce que nous faisons, le nombre de viols ne baisse pas, gros fail les gars, et qu’il serait peut-être plus judicieux de s’attaquer à l’éducation des personnes qui perpétuent ces violences ?

Genre déjà accepter cette problématique en arrêtant de trouver des excuses aux violeurs et en arrêtant de faire croire qu’il s’agit de malades mentaux alors que ça peut être n’importe lequel de nos potes, de nos mecs, de nos frères, de nos pères, de nos collègues, je continue ?, et puis sensibiliser, éduquer, informer, expliquer. Il y a tellement de choses à mettre en place. Ça me révolte. On continue à faire comme si les féministes et les victimes exagéraient, comme si ce n’était pas vrai, comme si on se battait déjà contre ça alors que non. Mettre la culpabilité et la responsabilité sur les victimes ça ne marche pas ! Les violeurs violent toujours. Voilà, bingo.

Dernière chose, et Ginger Force l’explique très bien dans sa vidéo*****, les mecs cis, arrêtez de vous considérer comme des bites sur pattes. Quand on se rend compte que des féministes, que des femmes, ont plus d’estime pour vous que vous n’en avez pour vous-mêmes, c’est chaud. Vous voyez moi je me bats contre le patriarcat, je suis harcelée, malmenée, violentée, objectivée, je subis la domination des hommes partout, tout le temps, j’utilise l’humour misandre, je connais les statistiques, les chiffres, je lis les témoignages de victimes chaque jour, il y a de quoi être dégoûtée des hommes je vous promets, et j’arrive encore à me dire que vous êtes plus que des chiens en rut qui ne pensent qu’à baiser. Parce que c’est ce que vous êtes, vous êtes plus que votre bite et vous valez mieux que ça. Seulement vous l’avez oublié, ou on ne vous l’a pas dit et puis ça vous arrange peut-être de le croire. Parce que partout pour tout le monde, c’est ce que vous êtes, des queutards qui n’ont qu’une idée en tête et qu’un but dans la vie : sauter des nanas. C’est bien triste quand même, il ne tient qu’à vous de changer ça.

Je me rends compte que j’ai encore énormément de choses à vous dire, notamment sur le consentement et les différents cas de viol, l’article est déjà long donc je vous prépare ça pour la prochaine fois !

Ressources :

* 90% des viols ont lieu dans l’entourage proche :

 

** viols ordinaires/viols conjugaux (attention, ça peut être triggering/faire remonter des choses douloureuses) :

 

*** « Les violeurs sont des monstres/malades mentaux » :

 

**** la culture du viol :

 

***** « Les hommes ont des besoins naturels » : Ginger Force

En bonus : « les violeurs/harceleurs ont peut-être vécu des choses difficiles » : Ginger Force

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